Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dérive d’un plan d’organisation, nettement conçu. Il faut distinguer ainsi d’une part l’unanimité d’opinion sur la règle de conduite à suivre, comme sur la nécessité de cette règle ; d’autre part la diversité d’opinion sur son fondement même.

8. Notre époque ne donne guère d’importance aux questions morales. Il y a rupture entre les hommes de pratique et les hommes de théorie ; entre l’action et les religions, ou les philosophies. Et pourtant ce dilemme s’impose : ou bien les coutumes de l’action sont justifiées, et alors ce sont les théories et les systèmes de règle qu’il faut refondre et adapter ; ou bien les théories morales sont vraies, et alors c’est la volonté humaine, incapable de s’y conformer, qu’il faut développer et perfectionner.

273. Évolution de la moralité.

1. La loi fondamentale de la modificabilité chez les êtres vivants, a pour conséquence que les fonctions les plus élevées sont celles qui se modifient le plus. C’est le cas pour la moralité.

2. La loi d’évolution morale réside dans la progression des plus nobles attributs de notre espèce. Le développement des penchants sociaux est lié au progrès total. Nous nous sommes améliorés, cela n’est pas douteux, en devenant moins égoïstes ; l’amélioration porte essentiellement sur les sentiments de bienveillance qui nous font plus humains et plus sociables. Les trois instincts sympathiques : attachement, vénération, bonté, se sont développés simultanément. Certainement la civilisation a constamment eu pour objet de subordonner la force à la morale. L’état social qui est en élaboration a pour dominante affective la sociabilité universelle ou la bonté. Notre supériorité reconnue, constatée vis-à-vis des êtres qui nous environnent, l’accroissement de notre puissance, tout devait concourir pour provoquer l’essor de la bonté.

3. Les écrivains moralistes fournissent la matière la plus ample aux études des mœurs. Ils étudient spécialement les penchants et les habitudes de la nature humaine et, par simple représentation de ces mœurs, ou par admonestation plus directe ils se proposent d’en tirer profitable leçon.

Quant aux sociologues ils étudient, eux, la moralité comparée des diverses nations et des diverses classes dont elles se composent. Elle présente toute une échelle, avec au sommet les actes d’héroïsme, de dévouement, de désintéressement, et au dernier degré les formes variées de la criminalité, de la prostitution, du vice, de la déchéance morale. La sociologie criminelle s’est constituée depuis une trentaine d’années, apportant des résultats importants basés sur des quantités de faits coordonnés. Les moralistes ont contribué à ces travaux. C’est avec raison qu’un corps scientifique comme le congrès américain des