Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/373

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aussi du droit divin. Au XVme siècle Machiavel envisage la politique en soi, sans préoccupations religieuses ni morales. Au XVIme siècle d’audacieuses recherches sur le droit naturel, les prérogatives du peuple, les limites du pouvoir des princes, illustrent, à des titres divers, Hubert. Languet, Hotman, Buchanan, Suarez, La Boëtie, Bodin, Thomas Morus, Campanella. Au XVIIme siècle, Grotius et Puffendorf érigent le droit naturel en science indépendante ; Hobbes en déduit l’absolutisme, tandis que Locke expose un système de gouvernement représentatif. Les philosophes du XVIIIme siècle essayent de dégager de la doctrine des conclusions pratiques ; ils s’éclairent aussi par l’étude des institutions de l’antiquité classique et de l’Angleterre, de la Chine, puis des États-Unis. Les physiocrates et d’Holbach préconisent le despotisme éclairé ; Rousseau, le gouvernement direct ; Mably, le gouvernement représentatif, avec prépondérance du pouvoir législatif ; Montesquieu (Esprit des lois), la séparation et l’équilibre des pouvoirs. La Révolution française proclame les droits de l’individu et réorganise l’État. Elle soulève les critiques des écoles historiques : Burke, Savigny, et des théocrates : Joseph de Maistre, de Bonald. Les doctrinaires et les libéraux laissent s’amoindrir la doctrine des droits de l’homme.

Mais les démocrates établissent en France l’égalité politique, manifestée par le suffrage universel. Dans la seconde moitié du XIXme siècle les historiens étudient les origines de l’État, les juristes son organisation comparée dans les diverses contrées, les philosophes et les économistes ses droits au regard des droits de l’individu, tandis que les hommes d’État cherchent à concilier les institutions existantes avec les principes d’égalité démocratique et de justice sociale. À la veille du XXme siècle et au commencement de celui-ci, le problème de la Société des nations est posé avec les questions de politique internationale qu’il soulève ; de grands congrès internationaux d’études en jettent les premières bases[1].

Il est intéressant de noter ici la lignée des ouvrages qui représentent, dans les doctrines politiques, ce qu’on peut appeler l’Utopie. Malgré leur irréalité au moment où ils étaient écrits ces ouvrages ont constamment agi sur l’esprit humain comme un stimulant et un idéal vers un meilleur devenir politique : La République, de Platon ; La Civitas soli, de Campanella ; Les Empires du soleil, de Cyrano de Bergerac ; Gulliver, de Swift ; L’Utopie, de Thomas Morus ; Le contrat social, de J.-J. Rousseau ; Le Tribun du Peuple, de Babeuf ; L’École individualiste, de Saint-Simon ; Le Phalanstère, de Fourier ; L’Icarie, de Cabet ; L’an 2000, de Bellamy ; Les Anticipations et La moderne Utopie, de Wells.

  1. Paul Janet, Histoire de la science politique dans ses rapports avec la morale (1887}. Contient une bibliographie très complète des ouvrages sur la politique.