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gulier accroissement. La guerre moderne a pris le caractère d’une lutte de nation à nation et non d’État à État.

Mais la guerre n’atteint pas seulement les belligérants. Elle étend ses dommages à tous les États neutres. Les dommages qu’elle occasionne sont ainsi universels. Elle met fin aux importations et aux exportations des matières premières et des produits et par suite aux transports qui en sont l’accompagnement ; elle rend impossible l’encaissement des sommes échues, entraînant ainsi des faillites et liquidations ; elle atteint les portefeuilles des capitalistes possédant des valeurs de pays en guerre, fonds d’État ou compagnies ; elle jette le trouble dans le marché des valeurs nationales à raison des réalisations intempestives et à tout prix qu’en font les détenteurs belligérants ; elle tue les industries de luxe, en particulier celles basées sur les plaisirs et le tourisme ; elle oblige à des mobilisations d’armées coûteuses. En enlevant des territoires étendus à la civilisation, elle restreint l’ère de la liberté ; en paralysant l’activité intellectuelle, artistique» scientifique, littéraire, éducative dans les pays en guerre, elle paralyse simultanément toute la partie de l’activité des pays neutres qui est basée sur l’échange et la coopération internationale des idées, des travaux et des œuvres. Le cortège des épidémies qui est la suite inévitable des guerres ne peut être localisé dans sa marche propagatrice et du théâtre des opérations militaires, il menace de proche en proche, les voisins pacifiques et, par eux, les pays plus éloignés. La guerre aussi détruit des villes, des monuments, des collections, des institutions qui sont devenus comme le patrimoine collectif de l’humanité. Enfin par le caractère d’acharnement désespéré que la guerre prend et prendra de plus en plus, elle fait courir aux neutres le risque croissant d’être entraînés dans le conflit.

La guerre donc, si elle peut encore être un bénéfice, bien problématique, pour quelques-uns, cause désormais un dommage à la communauté humaine tout entière. C’est pourquoi elle ne peut plus être considérée comme un droit pour personne, mais un acte portant atteinte aux droits antérieurs et supérieurs des tiers qui n’y sont pas volontairement impliqués, au « droit à la paix » dans le chef de ces neutres.

15. LA GUERRE EN GÉNÉRAL



Pour apprécier à sa véritable valeur l’événement, il faut remonter de la guerre actuelle à la guerre en général et se représenter ce qu’elle est, quel rôle elle joue dans les affaires humaines.

151. Notion.


On a défini la guerre un ensemble d’actes de violences au moyen desquels chaque belligérant essaie de soumettre l’autre à sa volonté.