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SUBSTITUTS DU LIVRE

dans un espace fermé. Au XIXe siècle deux types : la Scala de Milan et le Théâtre Wagnérien de Beyreuth. Au XXe siècle, quatre types : le théâtre (Van de Velde à Cologne, Gropius), la salle de concerts (salle Pleyel de Gustave Lyon et salle du Palais des Beaux-Arts à Bruxelles), la salle des conférences (projets de Hannes-Meyer et de Le Corbusier pour le Palais de la Société des Nations), la salle de cinéma, salle à visions et sons, reproductions et figures, mixtes entre la salle de théâtre et de concert ; il en est de quatre types : le rectangle, le trapèze, le cercle, l’ové. Le théâtre a réalisé des perfectionnements en ce qui concerne la salle et des dégagements et également l’agencement de la scène et des coulisses. Les besoins de la mise en scène ont considérablement évolué. Un plateau-modèle d’aujourd’hui ne ressemble guère à celui d’hier.

7. Mise en scène.

Jadis on était indifférent à la mise en scène. De nos jours on cherche à placer les pièces dans leur milieu. Les reconstitutions ont été nombreuses. On a même fait du théâtre pour avoir l’occasion de faire de l’archéologie. En ce qui concerne le costume, la réforme remonte à la Clairin et à Lekain. Mais la grande réforme de la décoration est du début de ce siècle. Les hommes dans un décor ; des indications plastiques infusant une vie particulière, intense, à l’image visuelle ; les masses et les individus soumis au rythme de l’ensemble. Les drames fantastiques, les féeries, les pièces à tiroirs sont conçues par les auteurs dramatiques en se servant de maquettes et des machines théâtrales, des « trucs » que leur proposent les petits inventeurs, ou qu’à leur tour, ils font établir. Les maquettes sont ensuite réalisées en augmentant les proportions.

8. Pays.

a) Allemagne. — Le théâtre occupe une place importante dans la vie intellectuelle de toutes les grandes cités allemandes. Il y a en Allemagne 250 théâtres. À l’opposé de ce qui se passe en France, où Paris seul consacre le succès d’une pièce, en Allemagne toutes les grandes villes peuvent créer des œuvres de valeur.[1] En Allemagne, sous l’influence des idées émises par Gordon Craig dans The Mask, M. Reinhardt, directeur du Kamerspiel et M Brahm, directeur du Lessing’s Theater, ont à Berlin poursuivi des études complètes de mise en scène. Mais c’est au Schauspielhaus de Düsseldorf qu’elles ont été poussées le plus loin. Ce théâtre a été fondé en 1905 par Gustave Lindeman et sa femme Louise Dumont. (Pièces : Médée, Faust, La Fiancée de Messine, etc.). Le théâtre s’est transformé en Allemagne en ces dernières années. Tandis que périclitent les théâtres dits d’affaires, les théâtres populaires prospèrent étonnamment. Celui de Berlin groupe 160,000 membres disposant de trois immeubles. C’est un grand mouvement de socialisation du théâtre au service d’une idéologie politique et qui rejoint les théâtres communaux exploités sous le contrôle direct des conseils communaux. Des écoles d’art théâtral ont été annexées à quelques universités. L’Institut de Kiel détient la plus grande bibliothèque théâtrale d’Allemagne.

Chez les peuples germaniques, le théâtre n’est pas un simple instrument de délassement. C’est un organe de la pensée et un instrument de l’éducation, au même titre que l’Université, la Bibliothèque, le Musée. Des théâtres y reçoivent des subventions de millions.

b) Russie. — Au théâtre bourgeois, expression de la classe possédante, le « Théâtre Prolétarien » oppose le théâtre de masse moyenne, expression des aspirations profondes des travailleurs manuels et intellectuels. À ce contenu nouveau, procédant d’une idéologie et d’une littérature nouvelle, correspond également une technique en tous points nouvelle.

9. Corrélations.

a) Texte écrit, texte lu, texte lu à haute voix, déclamation, théâtre, ce sont les termes d’une même série et ils sont en corrélation.

b) La genèse de l’opéra est pleine d’enseignements sur le mouvement qui conduit les arts à s’associer. L’opéra est une synthèse de plusieurs arts. En France, on fut longtemps hostile aux opéras italiens qu’avait introduit Mazarin. Le goût français s’effarait encore à l’idée d’un spectacle, comédie ou tragédie, dont toutes les paroles fussent chantées. Les gens de lettre étaient toujours plus ou moins ennemis de la musique et ne voulaient pas accepter qu’elle pût entrer en concurrence avec la poésie. Corneille la reléguait dans les entr’actes, pendant les changements de décor.

c) Il y a analogie frappante entre ce que les peintres nomment composition et ce que les gens de théâtre nomment mise en scène, c’est-à-dire entre l’art de disposer sur la scène les personnages d’une comédie, ou d’une tragédie et l’art de disposer les personnages d’un tableau sur la toile. Les acteurs forment une succession de tableaux d’expression essentiellement mobile et fugitive, mais qu’il suffirait de photographier instantanément pour les transformer en autant de compositions heureuses ou saisissantes. Au retour, on peut considérer telle ou telle toile de peinture historique comme de véritables tragédies jouées en pantomime et immobilisées devant nous. Une différence : le peintre trouve dans la distribution des lumières et des ombres un moyen de donner de l’importance à ses figures principales, tandis qu’au théâtre, sauf jeux de lumière spéciaux, l’éclairage est uniforme.

243.63 Fêtes. Jeux publics.

a) Dans la célébration des Fêtes, la distinction entre

  1. Voir Étude dans la Revue de Paris, mai 1929.