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Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/46

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s’arrêta guère que sept ou huit fois, chez autant de buvetiers où il causait familièrement de sa bonne fortune en ponctuant sa narration de verres d’eau-de-vie. Sa menue monnaie lui suffit dans ces stations, car il voulait garder précieusement sa pièce d’or pour une occasion dont on rendra compte.

Selon son usage, en calculant la longueur de ses confidences et le développement des détails d’après le nombre de ses relais, on peut juger que la dernière cabaretière chez laquelle il entra eut le récit le plus circonstancié de son mariage et des négociations qui l’avaient précédé. Toutefois il se sépara de ce dernier comptoir avec peine, et déboucha d’un pas encore ferme et majestueux sur l’esplanade des Invalides, en se tenant à lui-même ce discours stoïque qu’il s’adressait volontiers en pareil cas et que les passants étonnés entendirent : — Schérer, garde à vous ! l’inspection a l’œil sur toi, rengaine ta satisfaction en toi-même.

Son premier soin en arrivant à la grille, fut d’accoster un des nombreux fripiers qui se tiennent pour trafiquer des vieux uniformes, à la porte des établissements militaires ; et l’ayant introduit dans l’Hôtel, Schérer lui montra, pour le lui vendre, le costume complet, chapeau, culotte, habit, qu’on lui avait envoyé pour la cérémonie. Le marchand dit son prix ; il s’ensuivit un bon flot d’injures qu’ils vomirent l’un contre l’autre, après quoi ils tombèrent d’accord et traitèrent à l’amiable pour une somme de 10 francs, si l’on m’a bien dit. L’affaire conclue, le marchand emporta les habits de noce, et Schérer, jetant dans sa poche les deux pièces de cinq francs, qui devaient