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les métamorphoses

tel effort, que notre choc fait éclater le bruit du tonnerre dans les airs, et jaillir le feu du sein des nuages, l’un par l’autre heurtés. C’est moi qui, pénétrant dans les entrailles de la terre, et soulevant fièrement sur mon dos ses profondes cavernes, épouvante de mes secousses et le séjour des ombres, et l’univers entier. C’est avec de telles armes que je devais prétendre à l’hymen : je devais employer la force et non la prière, pour devenir le gendre d’Érechthée. » À peine Borée a-t-il proféré ces paroles, ou d’autres non moins fières, qu’il secoue ses ailes, dont le battement souffle le trouble sur la terre, et met en fureur le vaste Océan. Il déploie, sur le sommet des monts, sa robe qui soulève des tourbillons de poussière ; il balaie la terre, et s’enveloppant d’un épais nuage, il emporte dans ses ailes sombres la tremblante Orithye. Il vole, et son essor rapide donne à ses feux une force nouvelle. Le ravisseur n’arrête sa course aérienne qu’après avoir atteint le pays des Ciconiens, siège de son empire. C’est là que la vierge Athénienne devient à la fois épouse du roi des frimas et mère : elle donne le jour à deux jumeaux qui joignent aux attraits de leur mère les ailes de Borée. Mais on dit qu’elles ne naquirent point avec eux ; tant que la barbe ne parut pas au-dessous de leur blonde chevelure, Calaïs et Zétès furent sans ailes. Bientôt leurs flancs se revêtirent d’un plumage semblable à celui des oiseaux, en même temps que leurs joues s’ombragèrent d’un léger duvet : lorsque l’enfance eut fait place à la jeunesse, unis aux descendants de Minée pour la conquête de la toison d’or, ils s’élancèrent sur le premier vaisseau(31), à travers des mers inconnues.


(1) On lit dans Pline qu’Arachné, fille d’un Lydien obscur, inventa l’art de faire la toile et les filets, et se pendit de désespoir. La conformité de son nom et de son industrie avec l’araignée, presque toujours pendue à son travail, a sans doute fait imaginer cette métamorphose.

(2) Colophon, ville d’Ionie, où Apollon Clarius avait un temple et un oracle, existe encore sous le même nom.

(3) Pallas était regardée par les Grecs comme très-habile dans l’art de travailler la laine. (V. Élien. Hist. des Anim., liv. I, chap. 21.)

(4) Saint Augustin rapporte, d’après Varron, que Cécrops, en jetant les fondements de la ville d’Athènes, ayant trouvé un olivier et une fontaine, consulta l’oracle de Delphes, qui répondit que Minerve et Neptune avaient droit de nommer la nouvelle ville ; et que le peuple et le sénat, s’étant assemblés, prononcèrent en faveur de la déesse. (Cité de Dieu, liv. XXXIII, chap. l.)

(5) Sur la guerre des Pygmées, outre Homère, Iliade, liv. III, v. 6, Strabon, liv. I ; Athénée, liv. IX, et Anton. Libéral., liv. XVI, consultez les notes de M. de Boissonade sur Philostrate, Héroïques, p. 258.

(6) La belle Antiope, fille de Nyctéus, était célèbre dans la Grèce par sa beauté ; on la disait aussi fille d’Asopus, roi de Béotie. (Pausanias, liv. II, chap. 6).

(7) La fille d’Asopus était Égine (Spanheim sur Callimaque, Hymn. Del. v. 78). Suivant Nonnus et Lutatius sur Stace, Jupiter se changea en aigle pour la tromper. Elle mit Éaque au jour dans l’île d’Égine. (Apollodore, liv. I, chap. 9, §3.)

(8) Le nom d’Aloïdes est donné par les poètes aux deux géants jumeaux, Otus et Éphialte, fondateurs, selon Pausanias, de la ville d’Ascra au pied de l’Hélicon, et instituteurs du culte de trois muses nommées Méleté, Mnémé et Aédé, c’est-à-dire la Méditation, la Mémoire et le Chant. Voir M. Boissonade. Notice des Manuscrits, t. X, 2e part., p. 239.

(9) Bisaltis fut une nymphe aimée de Neptune, qui, pour la séduire, prit la figure d’un bélier et la rendit mère de Théophane. (Hygin, fab. 188).

(10) Mélanthe était fille de Deucalion et mère de Delphus.

(11) Dio, l’une des Hyades, était, selon certains mythologues, mère de Niobe. (V. Hygin. fab. 9.)

(12) Jupiter était en effet père de Tantale.

(13) Ampbion était regardé comme le fils de Jupiter et d’Antiope.

(14) Les anciens varient sur le nombre des enfants de Niobé. Hérodote lui donne deux fils et trois filles, Hésiode dix fils et dix filles ; Homère et Properce douze enfants. Elle fut vingt fois mère, suivant Pindore.

(15) Ce passage est vivement controversé. Lemaire propose la substitution très-plausible de turbam à turba. « Conjectura turbam dit M. Boissonade, ingeniosissima est eademque facillima… Sed quum conjectura vel probabilissimæ præstare debeat lectio codicis, idcirco prætulerim Latonæ turbæ, repertum in codice Ciofanii. Turbæ erit appositio του duorum, et eumdem fundet eadem cum ironia sensum ac turbam, quod του numerum est appositio. » (Not. in Planud.)

(16) Ici encore les corrections abondent. Gronovius, mécontent de l’ancienne leçon, ite sacris propere sacris, qu’il trouvait inintelligible, proposa : Ite, sat est operæ sacris. Il était plus simple de ponctuer : Ite sacris, propere sacris, en sous-entendant abscedite dans le second membre. Burmann voulait : Ite manus prohibete sacris : et Schirach : Ite satis, properate sacris. La leçon proposée par Lemaire fournit un sens plus vif, et la répétition de sacris, avec l’ellipse de la proposition, n’offre rien de choquant.

(17) On lisait autrefois per crura admissa. Heinsius, choqué de l’étrange rapprochement des jambes et de la crinière, crura jubasque, et se fondant au reste sur sept manuscrits, a rétabli la leçon que nous adoptons, colla admissa, c’est-à-dire, colla equi admissi ad cursum incitati.

(18) On voyait sur le mont Sypile, dit Pausanias, une ruche qui, de loin, ressemblait à une femme accablée de douleur, mais qui, regardée de près, ne présentait aucune figure de femme. Ovide imagina de transporter Niobé sur cette montagne, et de la métamorphoser en rocher, pour exprimer qu’elle était devenue comme immobile et muette dans son affliction. Callimaque, Apollodore, Diodore de Sicile et plusieurs autres écrivains de l’antiquité ont raconté la fable de Niobé.

(19) On donne le nom de Chimère à une montagne de la Lycie qui, selon Servius, Pline et Solin, jetait des flammes à son sommet, et était abondante en lions, en chèvres et en serpents. De là sans doute les poëtes en ont fait un monstre ayant la tête d’un lion, le corps d’une chèvre et la queue d’un serpent

(20) Olympe était disciple de Marsyas.

(21) Le Marsyas, fleuve voisin de Célènes, se jette dans le Méandre. La fable de Marsyas est racontée par Hérodote, Apollodore, Diodore de Sicile, Hygin, Paléphate et Fulgence.

(22) Pélops, roi d’Élide, fils de Tantale, est un des personnages les plus célèbres de l’antiquité. Il institua ou rétablit les jeux olympiques, et reçut, après sa mort, les honneurs divins. Il avait un temple à Olympie, près de celui de Jupiter. Clément d’Alexandrie rapporte que le Palladium de Troie était fait des os de Pélops.

(23) Mycènes était une ville de l’Argolide, dans le Péloponnèse, dont on attribue la fondation soit à Persée, soit à Mycènes, fille d’Inachus et femme d’Arestor. Le nom moderne et obscur de cette ville célèbre est S. Adriani Fanum ou Aglos Adrianos, dans la Sacanie, contrée de la Moréo.

(24) V. les Métamorphoses, liv. VIII, v. 272.

(25) Cléone était une ville placée entre Corinthe et Argos.

(26) Trézène était une ville du Péloponnèse, située près du golfe Saronique, dans l’isthme de Corinthe, aujourd’hui Damala.

(27) Paudion était fils d’Érichthonius et de Pasitée, roi d’Athènes vers l’an 1459 avant J.-C. Il ne faut pas confondre ce Pandion avec un autre roi d’Athènes, qui était fils de Cécrops II.

(28) Tacite a dit avec plus de hardiesse encore : « Nudare corpus et contrectandum oculis permittere. » (Annal., liv. 1, chap. 12.)

(29) Une note du commentateur latin explique les mots Stamina barbarica (tissu composé suivant l’art de ces temps barbares) par ceux-ci : « Ex antiquâ texendi ratione stamina ad perpendiculum suspendebantur ; unde apud nostrum alibi pendula tela, stantes telæ, etc. »

(30) Philomèle fut changée en rossignol, et Procné en hirondelle. Suivant une autre tradition, appuyée sur le témoignage d’Anacréon (ode xii) de Tzetzès, (chil., div. VII, v. 842), de Gabrias (Fab. xliii), et du scoliasto d’Aristophane (Oiseaux, v. 216), Philomèle fut changée en hirondelle, et Procné en rossignol.

(31) On aurait tort de croire que l’Argo fut le premier navire connu en Grèce. Ovide par ces mots : prima petiere carina, veut faire entendre que ce fut le premier vaisseau construit en forme de galère, navire dont la carène est très-allongée. Les vaisseaux grecs avaient été jusqu’alors d’une forme presque ronde, et n’étaient pas propres à une navigation de long cours.