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LES AMOURS

À cent nymphes et plus tu dicteras ta loi,
Car cent et plus ici respirent.
Ne me méprise pas, doux rejeton Troyen.
Mes dons passeront mes promesses. »
Ilie, alors baissant sa tête aux longues tresses,
De tièdes pleurs couvrit son sein.
Trois fois elle veut fuir, trois fois le bord l’enchaîne ;
La peur paralyse ses pas.
Enfin, de l’ongle encore attaquant ses appas,
En ces mots s’exhale sa peine :
« Plût aux dieux qu’on m’eût mise au tombeau paternel
Au temps de ma fleur virginale !
D’hymen que parle-t-on ? Criminelle vestale,
D’Ilion je souille l’autel.
Qu’attends-je ? d’adultère en tous lieux on me traite.
Périsse avec moi mon affront ! »
Elle dit, et, sa robe ayant voilé son front,
Dans l’eau rapide elle se jette.
Le lubrique Anio la reçut dans ses bras ;
On croit qu’elle devint sa femme.
Toi-même assurément quelque belle t’enflamme,
Mais Sylvain cache vos ébats…

Je parle, et dans ton lit l’onde à l’onde s’ajoute ;
Pour sa masse il est trop mesquin.
Que t’ai-je fait ? Eh quoi ! mettre à ma joie un frein,
Brutalement barrer ma route !
Encor si légitime et noble tu coulais,