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LES AMOURS

Nul métal ne souillait ce globe.
Or, argent, cuivre et fer dormaient aux profondeurs ;
De trésors se passaient nos pères.
Pourtant l’on avait mieux : moissons sans laboureurs,
Fruits spontanés, troncs mellifères.
Le coutre, en ce temps-là, ne fendait pas le sol ;
Point d’arpenteur ni d’enclos morne.
Sous la rame les nefs ne prenaient point leur vol :
L’homme acceptait la mer pour borne.
Mortel, ah ! contre toi tu fus industrieux ;
Tu te forgeas des maux sans nombre.
À quoi bon tes cités aux murs impérieux ?
Que sert dans tes mains ce fer sombre ?
La terre t’eût suffi : pourquoi risquer la mer ?
Veux-tu là-haut des champs plus amples ?
Oui, tu prétends au ciel ! Quirinus et Liber,
Alcide et César ont leurs temples.

Nous arrachons du sol de l’or, au lieu de fruits ;
Sanguinaire, un soldat possède.
Les grands sont honorés, les pauvres éconduits ;
D’où juge fier, chevalier raide.
Eh ! qu’ils gouvernent tout, Forum et Champ de Mars,
Que guerre ou paix par eux s’impose,
Pourvu que nos amours soient libres des richards
Et que le pauvre ait quelque chose !

Mais la femme aujourd’hui, fût-elle d’un vieux sang,