Page:Ovide - Métamorphoses, traduction Gros, 1866.djvu/11

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PRÉFACE. nu par l’exil dans cette grande tâche, comme Virgile l’avait été par la mort dans son Enéide, il voulut aussi livrer aux flammes ce monument imparfait de son génie : Sic ego non meritos, mecum peritura, libellos Imposuirapidis, visceranostra, rogis, Vel quod eram musas, ut crimina nostra, perosus, Vel quod adhuc crescenset rude carmen erat. Mais des copies s’en étaient répandues dans Rome, et le désir sincère où feint du poète fut trompé. Les Métamorphoses sont l’œuvre capitale d’Ovide. Tous les âges de la poésie, de la philosophie et de l’histoire s’y trouvent réunis et s’y déroulent à nos yeux dans une variété pleine d’ordre et de magnificence. Cosmogonie tout ensemble et théologie, les Métamorphoses offrent le tableau le plus complet de toutes les croyances, de toutes les révolutions de l’antiquité païenne : l’humanité s’y trouve à toutes ses périodes ; le monde antédiluvien, l’état barbare et primitif dans la Thrace ; l’état héroïque dans la Grèce ; l’état civilisé dans l’Italie, où ces transformations successives doivent aboutir à l’histoire romaine et à l’apothéose d’Auguste. Voyez comme le poète se joue agréablement dans cette trame si longue et si diverse ; comme il se complaît dans ces fables sans s’y laisser prendre pourtant ! il échappe aux enchantements dont il nous captive ; magicien habile qui dispose, malgré nous, de notre imagination et ne croit pas aux fantômes qu’il évoque, parce qu’il en a le secret. -Ainsi, parmi les modernes, l’Arioste, se jouant des contes de la chevalerie, comme Ovide s’était joué des fables du paganisme, trahit à chaque instant par un rire malin, par une piquante réflexion, son incrédulité à ces fictions magnifiques qu’il étale à nos yeux. Ce n’est pas le seul trait de ressemblance que l’esprit d’Ovide ait avec l’esprit moderne. Vif, souple, facile, brillant, il a une mobilité qui n’est