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ORNEMENTS ITALIENS.

du No. 1 (planche LXXX.) — cette tendance à la caricature, qui a tant défiguré les productions, que le génie de Romano enfantait avec une puissance de main de maître, mais malheureusement avec une trop grande fécondité. Tant que l’exubérance du génie de ce grand artiste s’est trouvée contrôlée par l’association d’artistes d’un goût plus pur que le sien, comme dans ses ouvrages à la villa Madama et à Rome, on ne peut trouver que peu de chose à lui reprocher ; mais lorsque dans la suite, devenu le « Gran Signore » à Mantoue, il devint énivré d’orgueil, il produisit des œuvres, toujours grandes et belles à la vérité, mais dans lesquelles il n’entre pas peu de ce qui est ridicule.

Les spécimens de ses arabesques que nous avons rassemblés à la planche LXXXVIII. montrent à la fois son talent et sa faiblesse comme ornemaniste. Incapable de se débarrasser des souvenirs qu’il avait de l’antique, et en même temps trop égoïste, dans sa vanité, pour se contenter d’en faire une reproduction fidèle, lorsqu’il puisait à cette source, il laisse entrevoir dans les sujets qu’il en empruntait, un aspect d’incertitude, qu’on trouve bien rarement dans les spécimens que nous possédons de l’antiquité. Les sujets qu’il tirait de la nature sont traités tout aussi mal : il ne cueillait les fleurs dont le sein de la nature est orné, que pour les écraser dans son étreinte grossière. Il existe, néanmoins, une hardiesse dans ses productions fantasques, et une sureté de main dans le dessin des cambrures de ses enroulements, qui lui assurent une place honorable dans le temple des arts. De même que « Van qui manquait de grâce, mais jamais d’imagination, » c’est sous le rapport du bon goût dont il a été, de son temps, un des principaux arbitres, que Griulio Romano faillit fréquemment, comme le prouvent plusieurs des ornements que nous avons reproduits à la planche LXXXIX., qui sont principalement pris du palais del Te, à Mantoue. Ainsi le No. 2 nous représente un enroulement dessiné avec hardiesse, mais dont l’effet est entièrement abîmé par l’objet ridicule d’où il s’élance ; le No. 3 nous offre des masques absurdes qui semblent ricaner des formes gracieuses qui les entourent ; et le No. 4 nous reproduit des spécimens où la nature et l’antique sont traités également mal. Le No. 6 de la même planche exemplifie une sévère morale : — Servile dans les endroits où l’ornement devrait être libre de toute entrave dans la disposition de ses lignes principales, libre et hardi dans les endroits où une certaine déférence à quelque type de forme cesse d’être servile, dans les éléments accessoires dont il est composé, cet enroulement courant, qui n’est qu’une adaptation d’un des patrons les plus communs de l’antiquité, laisse entrevoir à la fois, la faiblesse d’imagination de Romano et son manque de goût.

L’influence locale qui a réagi sur certains styles d’ornement, comme nous l’avons déjà fait remarquer pour les arabesques, peut se tracer aussi facilement dans les meilleurs exemples typographiques et xylographiques des anciens imprimeurs. Ainsi, les formes et la distribution presque uniforme des « pieni » et des « vuoti, » des ornements, Nos. 4-7, 9-16 de la planche XC, pris du célèbre « Etymologien Magnum, » imprimé à Venise en l’an 1499, trahissent évidemment l’influence du style des


Ornement typographique d’une des productions de l’aucienne imprimerie parisienne. (Testament grec de Stephau.)


fragments orientaux ou byzantins, que Venise possédait en si grand nombre. On pourrait presque

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