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ORNEMENTS ITALIENS.

et encore moins à être réduit à jouer le rôle de suppliant, fut contraint d’écrire au pape et à Bernini, des lettres de supplication, dans lesquelles il priait le sculpteur de se rendre à Paris. On dit que pendant toute la durée de son séjour dans cette capitale, Bernini reçut, quoiqu’il y travaillât peu, cinq louis d’or par jour, et que le roi, à son départ, lui fit remettre cinquante mille écus, et lui accorda, en outre, une pension annuelle de deux mille écus pour lui, et une de cinq cents pour ses fils, qui l’avaient accompagné à Paris. À son retour à Rome, il exécuta une statue équestre en l’honneur de Louis, statue qui est maintenant à Versailles. Au talent d’architecte et de sculpteur, Bernini paraît avoir ajouté celui de mécanicien et de peintre ; il a peint, dit-on, environ cinq cents tableaux dans le Case Barberini et Chigi. Il mourut en 1680.

Francesco Borromini, naquit près de Como, en 1599. Placé de bonne heure en apprentissage chez Carlo Maderno, il trahit bientôt un talent brillant comme sculpteur et comme architecte. À la mort de Maderno il lui succéda dans la surintendance des travaux exécutés à la cathédrale de St. Pierre, sous la direction de Bernini, avec lequel il se querella peu après. Grâce à son imagination ardente, à sa puissance inventive et à sa rare facilité comme dessinateur, il eut bientôt de nombreuses commandes à exécuter ; dans ses productions capricieuses et fantasques, il arriva à tourner en caricature tout ce qui, dans le style de Bernini, tendait à l’extravagance. Jusqu’à sa mort, en 1667, il continua assidûment à renverser tous les principes connus d’ordre et de symétrie, non seulement à son propre profit, mais à l’admiration générale des chefs de la mode de l’époque. Les anomalies qu’il introduisit dans toutes ses compositions ; les moulures disproportionnées, les 4 courbes rompues, contrastées et rentrantes ; les lignes et les surfaces interrompues et tordues, devinrent en vogue, et tous les artistes en Europe se mirent à imiter de semblables énormités. En France, elles firent fureur, et, au lieu des formes un peu bizarres mais pittoresques qu’on trouve dans les gravures de Du Cerceau, 1576 — on ne vît plus que les formes plus élaborées mais moins agréables semblables à celles exécutées par Marot, 1727 — et par Mariette, 1726-7. Les œuvres de Borromini, publiées en 1725, et celles de Bibiena, qui n’étaient guère plus pures, publiées en 1740, eurent une immense circulation et tendirent à affermir le public dans son admiration pour les ouvrages élaborés, décelant une grande facilité de conception et de dessin, versus la simplicité et la beauté. Malgré cette influence pernicieuse, plusieurs artistes français de l’époque, sous les règnes de Louis XIV. et de Louis XV., exécutèrent, au milieu de leur extravagance, un grand nombre de belles compositions ornementales, qui décelaient une beauté capricieuse de lignes, rarement surpassée ; telles que certaines compositions de Le Pautre (règne de


Ornement de frize, Louis seize, par Fay.


Louis XIV.), ainsi qu’un grand nombre de décorations d’intérieur qu’on trouve dans les œuvres de Blondel, publiées sous le règne de Louis XV.

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