Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/484

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cien : par vous j’ai pénétré au cœur de l’Université de Cambridge. Vous m’avez présenté à des hommes que je connaissais à peine et que j’aime à présent, Everett, Agassiz, et surtout le poëte Longfellow. Je vous dois un joli moment dans son cottage, le livre de ses poésies à la main et retrouvant toujours en vous ces lumières qui me sont aussi précieuses que votre amitié, j’ai appris à juger d’un seul trait la littérature américaine. Je la vois obligée de se rattacher à la tradition européenne, et je reconnais que pour elle il n’y a plus d’Océan.

Mais, mon cher voyageur, madame Ozanam vous jure qu’il y a toujours une Méditerranée ; à telles enseignes que pendant quatorze heures elle a ballotté de la façon la plus irrévérencieuse nos personnes, et quatre-vingt-dix autres chrétiens assez téméraires pour s’être confiés à ce perfide élément. Oui, tandis que vous filez des nœuds incalculables sur l’Atlantique, nous autres du vieux continent nous revenons aux navigations d’Homère, nous mettons une nuit et la moitié d’un jour à faire la course de Livourne, et il ne tient qu’à notre capitaine de nous procurer toutes les aventures de l’Odyssée. Enfin si nous avons échappé aux Lestrygons, aux Cyclopes et aux étables de Circé, nous sommes arrivés dimanche mouillés jusqu’aux os corps et biens, la lame avait passé sur le pont, balayé les magasins et visité les mal-