Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/536

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ma quarantième année, plus que la moitié du chemin de la vie. Je sais que j’ai une femme jeune et bien-aimée, une charmante enfant, d’excellents frères, une seconde mère, beaucoup d’amis, une carrière honorable, des travaux conduits précisément au point où ils pourraient servir de fondements à un ouvrage longtemps rêvé. Voilà à cependant que je suis pris d’un mal grave, opiniâtre, et d’autant plus dangereux qu’il cache probablement un épuisement complet. Faut-il donc quitter tous ces biens que vous-même, mon Dieu, vous m’aviez donnés ? Ne voulez-vous pas, Seigneur, vous contenter d’une partie du sacrifice ? Laquelle faut-il que je vous immole de mes affections déréglées ? N’accepterez-vous point l’holocauste de mon amour-propre littéraire, de mes ambitions académiques, de mes projets même d’étude où se mêlait peut-être plus d’orgueil que de zèle pour la vérité ? Si je vendais la moitié de mes livres pour en donner le prix aux pauvres, et, me bornant à remplir les devoirs de mon emploi, je consacrais le reste de ma vie à visiter les indigents, à instruire les apprentis et les soldats, Seigneur, seriez-vous satisfait, et me laisseriez-vous la douceur de vieillir auprès de ma femme et d’achever l’éducation de mon enfant ? Peut-être, mon Dieu, ne le voulez-vous point ? Vous n’acceptez pas ces offrandes intéressées vous rejetez mes holocaustes et mes sacrifices. C’est moi que vous demandez. Il est écrit, au commencement du