Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/170

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Mais le paganisme ne donnait pas à ses dieux de passe-temps plus doux que de contempler, du fond de leur repos, les périls des hommes. Aussi l’amphithéâtre avait-il plus de divinités protectrices que le Capitole, et Tertullien peut dire qu’il s’y asseyait autant de démons que de spectateurs. Diane y présidait aux chasses et Mars aux combats. Quand l’édit du magistrat promettait une chasse, les hommes qu’on livrait aux bêtes paraissaient avec les habits consacrés à Saturne, les femmes avec les bandelettes de Cérès, afin de témoigner qu’il s’agissait d’un sacrifice humain[1]. Si le peuple était invité à des combats, après que les gladiateurs avaient jonché le sol de leurs cadavres, une des portes de l’arène s’ouvrait et laissait voir deux personnages divers. Le premier portait les attributs de Mercure, et, de l’extrémité de son caducée rougi au feu, il tâtait les corps pour s’assurer qu’ils ne respiraient plus. Le second, armé du maillet de Pluton, achevait ceux qui vivaient encore. Cette apparition rappelait aux spectateurs qu’ils assistaient à des jeux funèbres, et que le sang versé allait réjouir sous terre les mânes des vieux Romains. Si quatre-vingt mille hommes frémissent de joie sur les bancs du Colisée, si les magistrats, les prêtres et les vestales du haut du Podium se penchent pour applaudir, c’est le paganisme qui per-


    Prudence, Hymnus de sancto Romano ; Sidoine Apollinaire, XIV, 6 ; Libanius, Oratio pro saltatoribus ; Code Théodosien, lib. XV, tit. 15, l. unic ; ibid., tit. 7, l. 1, 5, 12 ; Müller, de Ingenio, moribiis et luxu ævi theodosiani ; de Champagny, le Monde romain, t. II, p. 177 et suiv.

  1. Tertullien, de Spectaculis, 12 ; Acta sanctae Perpetuae.