Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

écoles, dans tous les rangs de la société romaine. Porphyre, le plus fidèle, le plus savant de ses disciples, vécut à Rome, en Sicile, à Carthage. Il y écrivit des livres qui, traduits en latin, achevèrent de populariser les opinions néoplatoniciennes. Elles descendirent ainsi jusqu’au cinquième siècle. Sous Valentinien III, en pleine lumière chrétienne, le païen Macrobe écrit un commentaire sur le Songe de Scipion. Il y trouve l’occasion d’exposer le système de Plotin, en le représentant comme une doctrine antique, commune aux plus beaux génies de la Grèce et de Rome, aux métaphysiciens et aux poëtes, qui concilie toutes les écoles et qui justifie toutes les fables. Tels furent les propagateurs du néoplatonisme en Occident. Il faut voir par quels attraits cette philosophie ardue, toute chargée de subtilités grecques, put séduire le bon sens des Latins[1].

Ce qui fit le prestige des doctrines alexandrines, ce fut cette contradiction même que nous avons surprise au fond de toute l’ancienne philosophie. C’est qu’elles commençaient par se détacher du paganisme et qu’elles y revenaient par des voies détournées ; c’est qu’elles charmaient la raison en lui promettant des dogmes sublimes, et contentaient l’imagination en lui laissant ses fables. Elles flattaient de la sorte un grand nombre d’esprits tourmentés des deux besoins de croire et de raisonner, et trop faibles pour embrasser l’austérité du christianisme.

  1. S. Augustin, de Civit. Dei, VIII et IX ; id., Epist., 118 ; Porphyre, de Vita Plotini ; Macrobe, in Somnium Scipionis.