Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/423

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vais vous lire à ce sujet l’admirable version donnée par M. Villemain, à laquelle il n’a rien laissé à ajouter :

«… Je m’avançais dans ce jardin, et Alype me suivait pas à pas. Moi, je ne m’étais pas cru seul avec moi-même, tandis qu’il était là ; et lui, pouvait-il m’abandonner dans le trouble où il me voyait ? Nous nous assîmes dans l’endroit le plus éloigné de la maison ; je frémissais dans mon âme, et je m’indignais de l’indignation la plus violente contre ma lenteur à fuir dans cette vie nouvelle, dont j’étais convenu avec Dieu, et où tout mon être me criait qu’il fallait entrer…… Je me jetai à terre sous un figuier, je ne sais pourquoi, et je donnai libre cours à mes larmes ; elles jaillissaient à grands flots, comme une offrande agréable pour toi, ô mon Dieu ! et je t’adressais mille choses, non pas avec ces paroles, mais avec ce sens : « Ô Seigneur ! jusqu’à quand t’irriteras-tu contre moi ? Ne te souviens plus de mes anciennes iniquités. » Car je sentais qu’elles me retenaient encore. Je laissais échapper ces mots dignes de pitié : «Quand ? quel jour ? Demain ? après-demain ? Pourquoi pas encore ? pourquoi cette heure n’est-elle pas la fin de ma honte ? »

Je me disais ces choses, et je pleurais avec amertume dans la contrition de mon cœur. Voilà que j’entends sortir d’une maison une voix comme celle d’un enfant ou d’une jeune fille, qui chantait et répétait en refrain ces mots : « Prends, lis ; prends, lis. »

Alors je revins à grands pas au lieu où était assis Alype, car j’y avais laissé le livre de l’Apôtre, lorsque je