Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/139

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suit avec un incroyable courage. Il n’ignore pas la barbarie qui en rejaillira sur son style, et il conjure Paulin de ne pas se laisser repousser par la langue simple et rude des Écritures-. Ailleurs il demande que le lecteur n’exige pas de lui une élégance qu’il a perdue au contact des Hébreux. Ainsi se produit là Vulgate, cette traduction de l’Ancien Testament en langue latine, un des plus prodigieux ouvrages de l’esprit humain et qu’on n’a pas assez étudiée sous ce point de vue. Par elle entre dans la civilisation romaine tout le flot, pour ainsi dire, du génie oriental, non pas tant par le petit nombre de mots hébreux intraduisibles que saint Jérôme a conservés et dont il est inutile de tenir compte. Ce n’est pas parce que la langue latine a adopté l’Alleluia et l’Amen qu’elle a multiplié ses richesses, mais c’est par les constructions hardies qu’elle s’est appropriées, par ces alliances de mots inattendues, par cette prodigieuse abondance d’images, par le symbolisme des Écritures où les événements mêmes et les personnages sont les figures d’autres événements et d’autres personnages, où Noé, Abraham, Job valent surtout comme types, comme représentations anticipées du christianisme, où les noces sacrées de Salomon représentent les noces futures du Messie et de l’Église, où, en un mot, toute image du passé se rapporte à -l’avenir. De là ce qu’on n’a pas encore assez remarqué dans les profondeurs du génie hébraïque, ce