recrue de la barbarie. Il ne fallait pas moins que ce grand remaniement de la langue latine pour y réunir tous les éléments de la civilisation ancienne et pour en faire la langue du moyen âge. D’abord le moyen âge devait être une époque de contemplation : rappelez-vous ces innombrables ascètes, ces moines, cette vie cénobitique qui déborde alors partout. Il fallait bien qu’elle trouvât son expression dans une langue qui se fût colorée aux feux qui éclairaient tes anachorètes d’Orient. Il fallait que le moyen âge trouvât dans l’idiome qu’il parlerait l’expression de ce symbolisme qui était aussi un de ses besoins. Aucune époque n’a plus cherché à représenter les idées par des figures, à découvrir dans chaque être le signe d’une pensée divine. Ainsi partout, dans sa poésie, dans son architecture, dans les œuvres du pinceau comme dans celles du ciseau, le moyen âge conservera le caractère allégorique le chant des psaumes pouvait seul prêter aux cathédrales gothiques une voix digne d’elles. Le latin était la langue nécessaire de la liturgie, qui est l’âme poétique du moyen âge. En second lieu, le moyen âge a le génie de la spéculation, une activité d’esprit qui ne se lasse pas de distinguer, d’analyser. Il produira ces légions de logiciens, de controversistes, dont l’infatigable subtilité ne se lassera pas d’analyser les choses de l’esprit. Il fallait aussi, pour rendre ces pensées, une langue assouplie, à l’exemple de la
Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/155
Apparence