Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/246

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Ils sont arrivés à faire pénétrer plus profondément et plus facilement les-vérités chrétiennes, sous ces formes poétiques, dans les classes lettrées du monde romain. Voilà ce qu’ils avaient voulu et ce qu’ils obtinrent. Mais ce qu’ils ne voulaient pas, ce a quoi ils n’avaient jamais songé et à quoi ils réussirent néanmoins d’une façon incomparable, ce fut de s’emparer, plus tard, d’une société qui n’était plus romaine, qui était chrétienne, mais barbare, et, à l’aide des poëmes chrétiens, d’y faire pénétrer le goût, et. jusqu’à un certain point, le génie et les traditions des lettres de l’antiquité. En effet ces deux chrétiens virgiliens pour ainsi dire, Sédulius et Juvencus, deviendront les instituteurs préférés de la jeunesse pendant tous les siècles barbares ce seront leurs poëmes évangéliques qu’on mettra dans toutes les mains, qui commenceront l’éducation de l’enfance. Après avoir trouvé des disciples, ils auront des imitateurs non-seulement en langue latine, mais aussi dans toutes ces langues nouvelles qui commencent à se former sur les modèles latins. C’est ainsi que l’Anglo-Saxon Cœdmon, ce prêtre qui, un jour, par la grâce de Dieu, se trouva inspiré et devint poëte, entreprendra aussi de chanter les origines du monde et la chute le premier homme. Plus tard, le moine franc Ottfried, vers le temps de Charlernagne, n’hésitera pas à écrire le grand poëme de l’Harmonie des Évangiles, s'efforçant le premier de faire retentir,