Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/257

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sance  ; revêtu de.tant d’honneurs, doué de tant de génie, avait-il pu tout à coup abandonner ses espérances et interrompre la succession d’une maison patricienne ? Ses parents ne lui pardonnaient pas, ses frères le reniaient, et ceux de sa famille qui passaient devant lui passaient comme le torrent, sans s’arrêter.

Mais, tandis que la société temporelle le repoussait, la société spirituelle lui ouvrait les bras, et Jérôme, Augustin, Ambroise, se félicitèrent de compter dans leurs rangs un grand docteur de plus. En effet, Paulin devint un théologien considérable ; mais il y avait en lui quelque chose de plus : l’âme d’un poëte s’était formée et s’était révélée dans ces déchirements intérieurs que lui avait coûtés sa conversion. Ausone, en apprenant le changement de son disciple, avait’ été d’abord atteint de désespoir, et lui avait écrit une lettre désolée dans laquelle il le suppliait de ne plus l’affliger ainsi : « Ne dédaigne pas le père de ton esprit. C’est moi qui fus ton premier maître, et le premier guidai tes pas dans la route des honneurs. C’est moi qui’ t’introduisis dans la société des Muses. Ô Muses, divinités de la Grèce entendez ma prière, et rendez un poëte au Latium[1]. »

Saint Paulin répond en vers du fond de sa retraite, et voici en quels termes « Pourquoi, dit-il,

  1. Ausone, Ep. XXIV, ad Paulinum.