Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/455

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et de haranguer la foule, avant que son discours, savamment médité, n’ait trois fois senti la lime. Et, se défiant enfin de son disciple, il lui propose vingt modèles de discours, comme autant de lieux communs pour toutes les grandes solennités de la vie politique : oraison du podestat entrant en charge et sortant de charge, éloges d’un podestat mort dans l’exercice de ses fonctions, réponse à des ambassadeurs qui proposent une alliance, harangues pour la guerre et contre la guerre. Ces discours sont écrits en latin, non pour servir de texte à une amplification en langue vulgaire, mais pour être appris et récités en latin, sous peine de perdre les ornements où l’auteur a mis tout son art et toute sa complaisance ; je veux dire ces périodes nombreuses dont le doigt et l’oreille ont marqué la cadence, ces chutes pareilles amenées de loin, ce choix d’expressions poétiques et ces hémistiches de Virgile enchâssés dans la prose du treizième siècle, comme des chapitaux corinthiens dans la maçonnerie d’un beffroi. Voici la requête d’une troupe de naufragés, dépouillés par les habitants de la côte, et réclamant justice pour eux, sépulture pour les morts. Dans le récit de leur naufrage nous avons toute la tempête accoutumée des poëtes, des demi vers, des vers entiers :

« Visum est in fretum totum descendere cœlum. Praebebant fulmina lucem. –Dant saltus