Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/277

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de fêtes solennelles, Charlemagne avait coutume de faire distribuer une pièce d’argént à chacun des pauvres qui se rassemblaient à sa porte. Or, il arriva que, le jour de Pâques, Wittikind, en habit de mendiant, s’introduisit dans le camp pour en observer les dispositions. Le roi faisait dire la messe sous sa tente et quand le prêtre éleva la sainte hostie, Wittikind vit, dans le pain consacré, la figure d’un enfant d’une beauté parfaite. Après la messe on distribua les aumônes. Le guerrier se présenta à son rang, fut reconnu sous ses haillons, arrêté, conduit au roi. Alors il raconta sa vision, demanda à devenir chrétien, et fit enjoindre aux chefs de son parti de poser les armes. Charlemagne le fit duc, et changea contre un cheval blanc le cheval noir de son écu. Ceci est le récit des Saxons. Ce peuple inflexible ne voulait avoir cédé qu’à l’intervention de la Divinité. D’un autre côté, les généalogistes placèrent Wittikind à la tête de la troisième race des rois de France, en le faisant aïeul de Robert le Fort. Plusieurs légendaires le comptèrent au nombre des saints, et au treizième siècle la Chanson de Wittikind le Saxon était encore récitée par les jongleurs français. Son nom ne périt pas ; il resta comme ceux de Roland, d’Arthur, de tant d’autres illustres vaincus que la poésie est allée ramasser sur les champs de bataille, comme pour montrer que l’imagination des peuples