Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/591

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ténèbres où les traditions historiques ne pénètrent que sous la forme de fables populaires, brille au contraire de tout l’éclat des études renaissantes. Assurément, quand le chroniqueur, du fond de ses montagnes et de ses neiges, raconte les conquêtes de Charlemagne sur la foi des vieux guerriers qui le suivirent, on peut croire que l’imagination prête bien des traits au tableau, et que la poésie fait irruption dans l’histoire. Mais, lorsqu’il suit le grand empereur dans la chapelle, et qu’il rapporte ses entretiens familiers avec les clercs, le chroniqueur est pour ainsi dire sur son terrain : il reproduit les récits qui ont fait le tour des monastères, et qui, exagérés sans doute, mais toujours reconnaissables, sont arrivés à Saint-Gall avec les pèlerins, avec les moines voyageurs, avec les laïques dégoûtés de la cour. S’il représente le docte Charles au milieu des chantres, marquant la mesure avec son bâton, gourmandant les uns, louant les autres, on reconnaît la passion favorite des rois francs pour le chant ecclésiastique, et cet ordre de la chapelle, qui tient de si près à l’enseignement de l’école. Aussi le moine n’a-t-il garde d’oublier comment, au retour de ses guerres, Charles faisait appeler les enfants qui étudiaient au palais, et corrigeait lui-même leurs compositions en prose et en vers. « Or il arriva qu’un jour les enfants des moindres familles lui présentèrent des écrits où le savoir passait toute espérance, tandis que les nobles n’offrirent que de