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Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/606

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inspiré qui les soutienne. S’il nous était donné de revenir un jour sur les temps obscurs où nous n’avons cherché que la trace de l’étude, nous y suivrions sans peine le sillon lumineux de la poésie et de l’éloquence. Sans doute nous ne trouverions pas la poésie dans les vers de Fortunat et d’Alcuin mais elle est déjà tout entière dans cet effort des âmes pour atteindre un idéal meilleur que les tristes réalités de la vie. D’un côté, c’est l’idée de l’empire, d’une monarchie qui échappe aux étroites limites des royautés barbares, qui se rattache à tous les grands souvenirs de l’antiquité:voilà le rêve de la société laïque, et en même temps la première pensée de l’épopée guerrière, de ces poëmes d’Alexandre, de César, de Charlemagne, éternel passe-temps du moyen âge. D’un autre côté, c’est l’idée de Dieu qui conduit les anachorètes au désert, les missionnaires au milieu des hasards de l’apostolat, les pèlerins aux saints lieux de Rome et de Jérusalem. Mais ni le désert, ni les saints lieux, ni les forêts païennes évangélisées, ni aucune des scènes de la terre, ne suffit à ce besoin de l’infini, qui fait le charme et le désespoir de l’imagination humaine. Lasse des beautés qui se voient, elle veut qu’on l’entretienne de l’invisible et, pour la satisfaire, il faudra que saint Fursy visite le ciel et l’enfer sous la conduite des anges, que saint Patrice descende au purgatoire. Ces visions rempliront les légendes des saints, elles agrandiront le