Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 5.djvu/117

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dominait la place, et qu’il se mit à prêcher, en prenant pour texte ces deux vers :

Tanto e il bene ch’io aspetto,

Ch’ogni pena m’è diletto.

On remarque aussi de saint Antoine de Padoue, qu’étant né Portugais, il prêchait aux Italiens dans leur langue avec tant d’efficacité, qu’il traînait après lui des auditoires de trente mille hommes[1] . Tels étaient les commencements de cette prose, destinée à prendre tant de vigueur et de gravité sous la plume du Dante et de Machiavel. La poésie ne devait pas rester en arrière : saint François lui avait rendu le même service en composant ses cantiques dans la langue de son pays. L’exemple fut suivi, et bientôt l’orthodoxie n’eut pas de dogmes si précis, le mysticisme ne professa pas de doctrines si hardies, de sentiments si élevés, qui ne prissent la forme du chant populaire pour descendre dans la multitude. Mais les auteurs de cette tentative furent plus soucieux de l’édification d’autrui que de leur gloire.

Les annales franciscaines n’ont point conservé le

  1. Chavin de Malan, Histoire de S. François, p. 135 ; Sigonius, de Episc. Bonon., p. 115 : « Non tamen ipse modum praedicantis tenuit, sed quasi concionanti » ; Fioretti di S. Francesco : « Della prima consideratione delle sacrosante stimmate. » Vita S. Antonii de Padua, apud Bolland. 13 junii, XIV :« Nec id admiratione vacat, cum in longinqua regione natus et educatus longo tempore fuisset, quod Italico idiomate ita polire potuit quæ voluit pronuntiare, ac si extra Italiam nunquam posuisset pedem. »