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quittant le monde l’attendaient dans l’Église, et jusque dans la paix apparente du cloître. Au moment où il entrait chez les Frères Mineurs, cette grande famille s’était divisée en deux partis. D’une part, on commençait à se relâcher de la pauvreté primitive, à demander l’adoucissement d’une règle écrite, disait-on, plus pour les anges que pour les hommes. D’un autre côté, le petit nombre des rigides prétendaient retourner à l’ancienne austérité en secouant l’autorité des supérieurs, qu’ils trouvaient complices des abus. Les premiers avaient pour eux la possession des dignités de l’Ordre, la gravité d’une vie sédentaire : on les nommait Conventuels. Les seconds étonnaient le monde par la sincérité de leur pénitence ; et comme ils gardaient mieux l’esprit de la règle, on les appelait les Frères Spirituels. Ce fut de ce côté que le désir de souffrir et d’expier jeta Jacopone ; et les événements semblèrent d’abord lui donner raison[1]

Il arriva qu’en 1294, le Saint-Siége étant vacant depuis vingt-sept mois, les cardinaux s’accordèrent à finir le veuvage de l’Église et à lui donner pour chef un saint, en la personne de l’er-

  1. Epistola S. Bonaventuræ, anno 1266. Wadding, Annales min. ad ann. 1278, 1282.

    Tosti, Storia di Bonifazio VIII, lib. III, p. 184. Je saisis avec empressement l’occasion de citer ce livre éloquent, où le savant prieur du Mont-Cassin a publié des documents qui manquaient à l’histoire.