dédaignée. D’un autre côté, si l’on y découvrait de fréquentes réminiscences des poëtes classiques, l’imitation semblait s’arrêter aux détails : l’ensemble ne pouvait se réduire aux modèles reçus ; on ne pouvait y reconnaître une œuvre rigoureusement épique, lyrique, élégiaque, selon les canons des critiques. On en a fait tour à tour à la Divine Comédie un reproche et un mérite. Le dix-septième siècle en eut honte et n’imprima que trois éditions du poëme national. Au dix-neuvième, qui en compte déjà près de cent, on a voulu faire du glorieux Florentin le type du génie indiscipliné, sans maître et sans règle. Et lorsque l’abbé Cancellieri publia la Vision du moine Albéric avec l’indication des passages qu’il supposait imités dans l’Enfer et le Paradis, les amis de Dante se soulevèrent. À peine permettaient-ils qu’il eût emprunté aux anciens : comment pouvait-il avoir reçu la leçon d’un moine obscur du douzième siècle ?
Aujourd’hui les solitudes du moyen âge se peuplent et s’éclairent. La Divine Comédie ne cesse pas de dominer les constructions poétiques qui l’environnent et la soutiennent ; mais on aperçoit autour d’elle un nombre infini de fictions semblables ; on voit une suite de récits de même genre se prolonger dans les siècles précédents, se retrouver dans la littérature de tous les âges, et témoigner ainsi de quelque grande préoccupation de l’esprit humain. Je voudrais tenter l’étude de ces origines,