Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/11

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conseillère des cas difficiles ? Mais plus encore que son jeu de paume, chaque village entretient avec jalousie son cimetière : ce lieu de deuil est tout planté de rosiers ; on y voit peu de sépultures délaissées, et nul n’entre à l’église sans avoir prié sur la tombe des siens. Le culte des morts est le signe des races qui vivent longtemps, qui ne laissent perdre ni l’esprit de famille ni l’héritage des traditions. Chaque année des centaines de Basques, séduits par les beaux vaisseaux mouillés à Bayonne ou au Passage, vont tenter la fortune en Amérique. Enrichis, ils ont hâte de revoir la maison de leur père, d’envoyer un jeune frère s’enrichir aux mêmes colonies, et d’orner de leurs présents l’église à l’ombre de laquelle ils dormiront à côté des aïeux. Quoi d’étonnant si des hommes qui ne savent pas oublier gardent religieusement la langue de la patrie, si les prêtres et les lettrés veillent sur elle comme sur un feu sacré, si les Basques de nos jours parlent encore l’idiome des vieux Ibères, ces aînés des Germains et des Celtes, et l’un des premiers peuples qui aient quitté le voisinage de Babel pour voir coucher le soleil dans les mers de l’Occident ?

Les montagnes sont toutes divines ; elles portent l’empreinte de la main qui les a pétries. Mais que dire de la mer, ou plutôt que n’en faut-il pas dire ? La grandeur infinie de la mer ravit dès le premier aspect ; mais il faut la contempler longtemps pour apprendre qu’elle a aussi cette autre partie de la