Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/506

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sacrés. Puis, quittant l’anneau pastoral qui ornait sa main, il le remit au Pape en le conjurant de le placer en une main plus digne. A cet aspect, toute l’assemblée fut émue. Plusieurs cependant inclinaient à recevoir une abdication qui semblait sauver à la fois l’honneur et la paix de l’Église, et peut-être aussi la vie de l’archevêque. Alexandre rejeta ces avis pusillanimes il voulut que Thomas reprît sa dignité, et il lui en conféra de nouveau l’investiture, acceptant ainsi, par un témoignage éclatant, la solidarité du péril. Enfin, pour assurer à l’exilé une retraite qui convînt à sa situation présente, il l’envoya dans une abbaye de l’ordre de Cîteaux, à Pontigny, près de Sens.

De même qu’en prenant possession de la chaire de Cantorbéry Thomas avait rejeté loin de soi l’appareil des grandeurs terrestres, en entrant dans sa cellule de Pontigny il laissa sur le seuil ces pompes modestes et religieuses que sa haute dignité ecclésiastique l’avait jusqu’ici contraint de retenir. Le grand primat d’Angleterre, accoutumé à recevoir l’obéissance de quatorze évêques, vécut sous le vêtement de bure d’un pauvre moine, et sous la règle d’un supérieur étranger. Il redoubla d’austérités et de prières ; la Bible, les Canons, l’histoire de l’Église, occupaient ses longues et silencieuses journées. Entretenues dans une sphère si haute, ses idées prirent un essor que rien n’arrêta plus ; il vit avec indignation ces géants de la terre, ap-