Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/87

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cachots du château, et chaque jour elle leur portait quelque nourriture. On dit qu’un soir son père la rencontra cachant dans un pan de sa robe le pain et le vin des captifs ; et, comme il la pressait de questions : «Je porte des roses, » dit-elle, et, laissant retomber son vêtement, elle répandit une pluie de fleurs. Les prisonniers remerciaient leur bienfaitrice en lui chantant leurs cantiques :elle apprit à connaître le Christ et la Mère du Christ. Mais une inflexible fatalité semblait lui fermer les portes de l’Église. Dieu les lui ouvrit en la frappant d’un mal qui résistait à tous les soins. Une vision l’avertit qu’elle ne trouverait la santé que dans les eaux du lac de Saint-Vincent, près de Briviesca, en terre chrétienne. Le père éperdu consentit au voyage. Mais il voulut que sa fille partit avec une suite nombreuse et chargée de présents pour le roi Ferdinand I° qui régnait dans Burgos. Ferdinand fit à la musulmane un accueil royal. Bientôt après elle se plongeait dans les eaux du lac Saint-Vincent ; elle en sortit guérie et demanda le baptême. Puis, congédiant son cortège, elle se bâtit près du lac une cellule, où elle acheva sa vie dans la pénitence. Chaque année, le 17 avril amène à l’ermitage de Sainte-Casilde les laboureurs et les pâtres des montagnes voisines : ils ramassent avec respect, aux lieux où la pénitente châtiait son corps, de petites pierres rouges qu’ils croient tachées de son sang.