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DE L’AUMÔNE
Décembre 1848.


C’est une thèse préférée des socialistes, de dénoncer l’aumône comme un des détestables abus de la société chrétienne. Car, disent-ils, l’aumône insulte le pauvre, puisqu’elle l’humilie, puisqu’elle ne lui permet pas de rompre son pain noir sans reconnaître qu’il est redevable à ceux qui se disent ses bienfaiteurs, et qu’étant devenu leur obligé il a cessé d’être leur égal. Ils en concluent que l’aumône, loin de consacrer la fraternité, la détruit, puisqu’elle constitue, pour ainsi dire, le patriciat de celui qui donne, l’ilotisme de celui qui reçoit. Ce qu’ils réclament pour les opprimés de la misère, c’est un partage qui les satisfasse et ne les oblige pas, c’est un règlement qui les laisse quittes envers la société ; ce n’est pas la charité, c’est la justice. Nous ne saurions méconnaître l’habileté d’une doctrine qui est sûre de ne pouvoir se produire dans les discussions publiques sans se faire couvrir d’applaudissements, puisqu’elle s’adresse au plus opiniâtre des sentiments humains, à celui qui palpite sous les haillons comme sous l’or et la soie nous voulons dire l’orgueil. Oui, c’est l’éternel