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DE LA DEUXIEME VERTU

Pour éternellement liant les bras de ma justice, pour éternellement déliant les bras de ma miséricorde.

Et contre ma justice inventant ime justice même.

Une justice d'amour. Une justice d'Espérance. Tout était consommé.

Ce qu'il fallait. Comme il avait fallu. Comme mes pro- phètes l'avaient annoncé. Le voile du temple s'était déchiré en deux, depuis le haut jusqu'en bas.

La terre avait tremblé; des rochers s'étaient fendus.

Des sépulcres s'étaient ouverts, et plusieurs corps des saints qui étaient morts étaient ressuscites.

Et environ la neuvième heure mon Fils avait poussé

Le cri qui ne s'effacera point. Tout était consommé. Les soldats s'en étaient retournés dans leurs casernes.

Riant et plaisantant parce que c'était un service de fini.

Un tour de garde qu'ils ne prendraient plus.

Seul un centenier demeurait, et quelques hommes.

Un tout petit poste pour garder ce gibet sans impor- tance.

La potence où mon Fils pendait.

Seules quelques femmes étaient demeurées.

La Mère était là.

Et peut-être aussi quelques disciples, et encore on n'en est pas bien sûr.

Or tout homme a le droit d'ensevelir son fils.

Tout homme sur terre, s'il a ce grand malheur

De ne pas être mort avant son fils. Et moi seul, moi Dieu,

Les bras liés par cette aventure.

Moi seul à cette minute père après tant de pères,

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