elle ne peut s’affaisser sur moi, mais j’appréhende une caresse brutale et lascive, un baiser sur la nuque, une morsure. Tout à l’heure quand elle a passé derrière ma chaise, j’ai instinctivement rentré le cou. Il faut fuir. Je prononce lentement, froidement :
— En vérité, madame, je regrette infiniment l’absence de M. Olivet. Je désire avoir avec lui un entretien tout à fait sérieux.
— Auquel je ne dois pas assister… c’est gentil !
— J’espère au contraire que vous y prendrez part ; mais la présence de votre mari est — je le crois de plus en plus — indispensable.
Elle se mit à rire d’une façon singulière.
— Vous me surprenez, monsieur Tournemine, vous me surprenez beaucoup. Tenez ! je veux être franche avec vous… Je ne vous cacherai pas que j’ai cherché ce tête-à-tête. Je veux que nous parlions en toute liberté afin de dissiper l’équivoque… l’équivoque qui pèse, en somme, sur nos relations.
— Je ne vous comprends pas, madame.
— Vous n’avez donc pas de mémoire ?
— Pas en ce moment… Dès qu’on me parle du passé, je n’y suis plus… je ne comprends plus, madame… Je n’existe que par l’espoir ; toute ma vie est en avant.
— C’est une phrase !
— C’est un fait ! Voyez-vous, madame, nous ne parlons pas le même langage. Pour qu’il n’y ait pas d’équivoque comme vous dites, je vais mettre les