Page:Pérochon-Le Chemin de plaine.djvu/84

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preté, je l’accueillerai volontiers ; il y a de la place ici pour nous deux. Par exemple, je n’aime pas les araignées ! elles seront toujours des étrangères chez moi. J’en ai déjà tué trois ; que les autres prennent garde !

Si rien n’est changé dans mon logis, rien sans doute n’est changé à Lurgé.

Demain, je vais recommencer la même classe avec les mêmes collègues et presque les mêmes élèves. Je reprends ma vie où je l’avais laissée. Je vais tracer le même sillon avec mon harnais habituel.

Seulement, j’ai l’oreille un peu basse. Cela ne me rajeunit pas de regarder ainsi en arrière. Entre la dernière page de mon journal et celle-ci j’aurais dû laisser tout un cahier de feuilles blanches.

Est-ce bien moi qui ai couru au mois de juillet, en pleine chaleur, ces aventures médiocres ? Comment ma plume a-t-elle pu écrire ces phrases fiévreuses ? Car j’ai bel et bien eu la fièvre un moment. Et pourquoi — et pour qui, justes cieux ? Comme cela est loin de moi !

Il me semble que je n’aurai jamais plus de passions. Je n’ai que des désirs paresseux. Je songe à mille petites misères, à mille gestes menus et pénibles. On doit être ainsi lorsqu’on se sent vieux.

Je me sens vieux.

Qui m’attriste ainsi ? Est-ce l’automne ? Est-ce toi, vieil Automne sur qui je n’ai pas le courage de balancer une phrase ? Mais non ; tu n’entres pas