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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/209

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CHAPITRE III

LA BRACONNE


Le dimanche, Séverin faisait de longues courses dans les champs. Dès les premiers temps de son veuvage, il avait commencé à sortir ainsi pour ne pas rester immobile à songer. Puis, peu à peu il avait pris le pli de ne jamais rester tout un dimanche au village.

Quand il n’était plus utile chez lui, il s’en allait voir les semis de maïs ou bien les jeunes plants de choux ou bien les champs de pommes de terre où le sol commençait à se soulever autour des tiges. Il passait sur les guérets, arrachait une ravenelle ou une touffe de chiendent, écrasait par habitude les mottes échappées à la herse. Il longeait les haies où bruissent, dans l’ombre chaude, des bêtes ignorées. Il détruisit quatre ou cinq nids de vipères. Il regardait comment les branches poussent ; s’asseyant dans les cheintres, il s’amusait à cueillir et à considérer les herbes sans noms, les herbes indifférentes sur lesquelles grimpent de petites bêtes — sans noms aussi — qui sautent quand on les touche ou font les mortes.

Il remarquait des choses auxquelles il n’avait jamais fait attention jusque-là.

Un dimanche du mois d’août, comme il était de