— C’est l’âge, dit-elle, c’est l’âge, vois-tu, qui la travaille. Il faut que cela passe ; dans deux ou trois ans, elle sera forte.
Lui parti, elle ajouta :
— Elle sera forte ou morte, ça dépend.
Pendant l’été de sa quatorzième année, Bas-Bleu résista à peu près au mal, mais, à la Toussaint, une bronchite la coucha. La Bernoude ayant justement ses douleurs, ce fut Georgette qui eut la charge de soigner sa sœur ; heureusement, les voisines lui vinrent un peu en aide. Au bout de trois semaines, Bas-Bleu put se lever, mais elle resta sans force. Elle toussait de plus en plus et s’essoufflait au moindre effort.
Enfin, vers Pâques, comme elle achevait ses quinze ans, elle cracha tant de sang, un dimanche matin, que Séverin vit bien que son enfant allait mourir de cette mauvaise toux.
Cette année-là fut terrible. Dès le printemps, Séverin avait gagé les bessons comme toucheurs de bœufs ; mais Constant tomba d’un cerisier et se cassa une jambe, si bien que, pendant un mois, il y eut deux malades dans le pauvre creux-de-maison. Il est vrai que Bas-Bleu se levait encore et même cousait un peu.
La grand’mère venait de temps en temps, mais la maison était si humide qu’elle retombait tout de suite percluse et qu’il lui fallait bien vite s’en retourner chez son gars.
Le dimanche, Séverin ne prenait plus le temps d’aller à la grand’messe ; quand il n’était pas de garde chez son patron, il passait toute sa journée à faire le ménage. Il balayait, lavait, brossait, cousait, faisait les lits,