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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/351

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qu’il est impossible de rendre clairement en français. Trimalchion y revient encore quelques lignes plus loin, lorsqu’il dit aux convives : Non negabitis me habere Liberum patrem. Les anciens donnaient le nom de Pater à presque tous les dieux, et celui de Mater aux déesses, comme le prouve le nom de Jupiter, composé de Zeus et de Pater, ou, selon d’autres étymologistes, de Juvans Pater ; on trouve partout, dans les poëtes, le nom de Materdonné à Junon, à Cérès, etc. Nous rappellerons, à propos de ces divers noms donnés à Bacchus, qu’Antoine eut la fantaisie, en traversant la Grèce, de se faire appeler Liber ou Bacchus ; il prit le costume de ce dieu, et, comme lui, monté sur un char traîné par des tigres, il se fit accompagner d’hommes et de femmes vêtus en satyres et en bacchantes. Les Athéniens allèrent à sa rencontre en l’invoquant comme Bacchus ; et, pour se moquer de lui, lui offrirent en mariage la déesse Minerve, protectrice de leur ville. Antoine prit fort bien la plaisanterie ; mais, pour les payer de la même monnaie, il accepta la fiancée qu’ils lui offraient, et leur fit payer mille talents pour sa dot.

CHAPITRE XLII. 1 Homo bellus. — Cette épithète bellus est parfaitement placée dans la bouche de celui qui parle, et nous apprend l’usage que l’on doit faire de ce mot, qu’on applique souvent mal à propos, et qui ne peut convenir à un personnage de quelque importance. Il se prenait tantôt en bonne, tantôt en mauvaise part. Martial raille plusieurs personnes qui, de son temps, abusaient de ce mot, dont il détermine le véritable sens dans les épigrammes 7 du livre II et 63 du livre III, où il dit : « Un joli homme sait et fait joliment une foule de jolies petites bagatelles inutiles ; et tout son mérite se borne là ; bien différent en cela d’un honnête homme, etc. » Aussi, dans le passage qui nous occupe, Seleucus, après avoir dit que Chrysante était un homme aimable, un joli homme, ajoute et tam bonus, comme pour corriger la faiblesse du premier éloge.

2 Medicus enim nihil aliud est quam animi consolatio. — Cet axiome de Pétrone, quoique placé dans la bouche d’un fou, est admirable. En effet, le médecin doit commencer sa cure par consoler son patient, par guérir son esprit toujours affecté par la maladie. C’est ce que négligent trop de docteurs dont l’aspect triste, la figure sévère, le ton brusque et tranchant, sont plus propres à intimider le malade qu’à lui donner le courage dont il a besoin.

CHAPITRE XLIII. 1 Qui linguam caninam comedi. — Scheffer s’imagine à tort qu’il est question ici de cette herbe qu’on appelle cynoglosse, ou langue de chien, plante borraginée, narcotique et anodine, qui n’a