Une noble indifférence
Est le gage du succès.
Ô ciel ! si tu m’exauçais !
Un esprit malin m’enchaîne ;
Son pouvoir est le plus fort.
Espère dans ton sort.
Dans ma perte trop prochaine
Je vois l’horreur de mon sort ;
Pour mon cœur en peine.
Hélas ! mieux vaut la mort.
Si du ciel la loi t’enchaîne,
Fièrement subis ton sort.
La fortune avec transport
Couronnera ton noble effort.
Le courage est le plus fort,
S’il se rit des coups du sort.
Il succombe, vain effort !
Non, il ne peut fléchir le sort.
Mon fils, l’espoir en Dieu conduit au port.
Allons, demain que la chasse
Éveille l’écho des grands bois.
Que l’aigle planant dans l’espace
Demain succombe, s’il passe,
Et tremble le cerf aux abois !
Sonnez, cor joyeux dans la plaine !
Sonnez, la victoire est certaine.
Chasseurs, vive la chasse et l’amour.
Amis, au déclin d’un beau jour,
Ensemble chantons à voix pleine :
Fêtons tour à tour
La chasse et l’amour.
Scène III
Monsieur Kouno, c’est un brave homme.
Sans rancune !
Soyons amis, et meilleure fortune !
En attendant, viens danser.
Moi, danser !
Eh bien ! sans toi le bal va commencer,
Avec moi qui veut bien valser ?
Quelques jeunes filles s’avancent ; Kilian en choisit une et valse ; les autres le suivent, — Les groupes font le tour du théâtre et disparaissent successivement au fond. — Max reste seul. — Le jour commence à baisser.)
Scène IV
Ah ! trop longtemps de mes souffrances
J’ai dû subir l’horrible loi !
Dieu, qui brisez mes espérances.
Votre anathème est donc sur moi !…
(Moderato.)
Frais vallons, bois, voûtes sombres,
Solitudes que j’aimais,
Je n’emporte sous vos ombres
Que des larmes pour jamais ?
Ah ! jadis avec tendresse
Deux beaux yeux brillants d’espoir
M’accueillaient gaîment le soir,
Et le prix de mon adresse,
Belle Agathe, oui, c’était de te revoir.
Eh quoi ! le ciel dans sa colère
A-t-il voulu m’abandonner ?
Hasard fatal ou tutélaire,
À toi mon sort va se donner.
(Andante.)
Dans la nuit triste et déserte,
Devinant au loin mes pas,
Près de sa fenêtre ouverte
Elle écoute et n’entend pas ;
Le bruit seul du vent qui pleura
Lui fait croire que je viens.
Elle appelle, voici l’heure,
Ses soupirs cherchent les miens.
(Allegro.)
Un noir démon de moi s’empare
(Samiel s’avance à grands pas du fond du théâtre ; il va lentement et regarde fixement devant lui.)
Ô sort barbare !
Ô revers !
Je sens les chaînes des enfers !
Partout la nuit profonde,
La foudre gronde,
Ah ! grand Dieu ! sauve-moi !
Tout m’abandonne… jour d’effroi !
Satan m’enchaîne sous sa loi !
Au désespoir je succombe.
Et c’est ma tombe
Que je voi !
Scène V
« Encore là, camarade ? ah ! tant mieux !