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s’étendoît en sens contraire ; ces mouvemens ne concernent point les individus, mais les nations dans leurs progrès, & préparent un nouvel ère à la race humaine.

Le danger qui menace davantage le succès des révolutions, c’est lorsqu’elles naissent avant que les principes dont elles découlent, & les avantages qui en résultent, soient vus & sentis. Presque tous ces traits, qui caractérisent une nation, ont été confondus sous le mot général & mystérieux, gouvernement. Quoiqu’il évite d’avouer les erreurs qu’il commet & les maux qu’elles occasionnent, le gouvernement n’oublie point de s’attribuer la plus légère apparence de prospérité. Il enlève à l’industrie ses honneurs, en proclamant insolemment ses succès, & dérobe ainsi au caractère général de l’homme, ce qui lui appartient comme être social.

Il est donc nécessaire, dans ce jour des révolutions, de séparer ce qui est l’effet du gouvernement d’avec ce qui ne l’est pas. On ne peut mieux y réussir qu’en jettant un coup-d’œil sur les sociétés, & leur civilisation & leurs conséquences, comme objets distincts de ce qu’on nomme gouvernement. Commençant par ces recherches, nous serons en état d’assigner aux effets leur véritable cause, & d’analyser la masse des erreurs vulgaires.


CHAPITRE PREMIER :


De la société & de la civilisation.


Une grande partie de l’ordre qui règne entre les hommes, n’est pas l’effet du gouvernement, mais tire son origine des principes de la société & de la constitution de l’homme ; il est antérieur aux gouvernemens & survivroit à leurs formes. La dépendance mutuelle & les intérêts réciproques qui