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les antinomies entre l’individu et la société

L’entre-croisement des groupes peut contribuer à la libération de l’individu. La seule multiplication des groupements auxquels un même homme peut appartenir rend ces groupements à la fois moins exclusifs et moins oppressifs. La multiplicité des cercles sociaux auxquels il participe avertit l’individu des contradictions sociales, des conflits entre groupes et entre morales de groupe ; elle suscite en lui le doute sur le bien-fondé de ces morales ; elle arme l’individu de cette salutaire méfiance qui sera pour lui une défense et comme un bouclier contre les prétentions excessives de l’autorité sociale. — Ce n’est pas tout. L’individu peut mettre à profit l’entre-croisement des groupes pour opposer ces groupes les uns aux autres ; pour s’appuyer à l’occasion sur l’un d’eux contre les autres ; pour exploiter leurs rivalités, leurs défiances et leur hostilité réciproques, pour pratiquer contre eux, sinon le divide ut imperes, du moins le divide ut liber sis.

Je ne sais si M. Bouglé admettrait toutes les conséquences et toutes les applications possibles de la loi de l’entre-croisement des groupes dans cet ordre d’idées. Car il est telles de ces conséquences et de ces applications qui peuvent aller jusqu’à être nettement antisociales et servir délibérément à la satisfaction des désirs antisociaux des individus. Mais enfin, on peut les tirer, ces conséquences, et aussi utiliser ces applications avec un succès relatif. —