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Page:Palante - Les antinomies entre l’individu et la société, Alcan, 1913.djvu/34

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l’antinomie dans la vie intellectuelle

nos organes sensoriels eux-mêmes à un dressage social poursuivi pendant des siècles.

Dire encore avec M. Draghicesco que l’école crée la faculté d’attention, c’est méconnaître ce simple fait d’observation courante chez ceux qui ont la pratique de l’enseignement : l’énorme différence dans la puissance d’attention qu’on peut remarquer chez les enfants, différence qui a sans aucun doute sa racine dans l’organisation native, nerveuse et même musculaire de l’enfant. L’énergie de son attention spontanée dépend moins assurément des suggestions scolaires et de la parole du maître, si éloquente et si persuasive soit-elle, que des goûts de l’enfant qui font qu’il s’intéresse à ceci ou à cela.

La tendance à regarder toutes les facultés intellectuelles comme apprises, comme acquises, comme suggérées par l’éducation relève toujours de la même erreur qui consiste à vouloir tout expliquer par la socialité et à ne faire aucune part aux différenciations congénitales de l’individu. L’intelligence tout entière se ramènerait à l’éducation et au langage. Certes personne ne songe à contester l’importance du langage dans l’évolution de l’intelligence comme instrument d’élucidation des idées. Mais l’éducation et le langage ne sont pas tout. Il y a dans la constitution native de l’individu quelque chose qui limite l’action de l’éducation et qui individualise en chacun la pensée sociale exprimée dans le langage.