Page:Palante - Précis de sociologie, 1901.djvu/60

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sociale. Celle-ci a beau être oppressive, elle ne réduira pas l’originalité individuelle. Chaque cérébralité individuelle a sa façon de comprendre le processus social antérieur et ambiant, de le résumer et de le dépasser.

Suivant nous, ces centres de force psychique que sont les individus ne se fondront jamais dans l’harmonie amorphe de « la socialité ».

Il y a d’autres points faibles dans la théorie de M. de Roberty. Qu’entend-il au juste par cette « socialité », véritable objet, suivant lui, de la Sociologie ?

Cette socialité ressemble fort à une entité. Définir le psychisme individuel en fonction du psychisme collectif, c’est définir obscurum per obscurius. Quand M. de Roberty veut donner une idée un peu claire de sa « socialité », il est forcé de l’exprimer en termes empruntés à la psychologie individuelle.

Herbert Spencer est moniste comme M. de Roberty. Pour lui, le fait générateur des sociétés est la loi universelle de l’adaptation. Spencer définit la vie sociale « une correspondance, une adaptation constante de rapports, les uns internes, les autres externes. Mais il n’admet dans cet ajustement qu’une seule direction, celle qui plie les rapports internes aux rapports externes. L’adaptation interne est absolument subordonnée à l’adaptation externe. Ainsi les antagonismes sociaux, et en particulier le conflit de l’Individu et la collectivité ne peuvent être que passagers. Au fond et au terme des choses se trouve l’harmonie, l’unité.

Nous n’admettons pas plus ce monisme que celui de M. de Roberty et pour les mêmes raisons. Nous croyons, à cause de la diversité — empiriquement donnée — des moi, qu’il y aura toujours lutte à quelque égard entre ces moi, et que par suite l’adaptation complète du moi à son ambiance extérieure est un pur rêve. Spencer croit que les conflits disparaîtront et qu’un jour viendra où l’adaptation intérieure ne sera que le reflet de l’adaptation externe de l’être. D’après nous,