Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/184

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DES EAUX ET FONTAINES.


Theorique commence.



I e me trouuay ces iours passez (allant par les champs) fort alteré, et passant par quelque village ie demanday où ie pourrois trouuer quelque bonne fontaine, afin de me rafraichir et desalterer, à quoy me fut respondu qu’il n’y en auoit point audit lieu, et que leurs puits estoient tous taris, à cause de la secheresse, et qu’il n’y auoit qu’vn peu d’eau bourbeuse au fond desdits puits. Ce qui me causa grande fascherie, et fus fort estonné de la peine où estoient les habitans de ce village, à cause de l’indigence d’eau. Et lors me souuint d’vne promesse que tu m’as faite long temps y a, de me monstrer à faire des fontaines aux lieux les plus stériles d’eaux. Or puis que nous sommes de loisir, ie te prie (suyuant ta promesse) de m’apprendre ceste science qui me sera fort vtile : Car i’ay vn heritage où il n’y a point de fontaines, et n’y a qu’vn puits qui est suiet à tarir aussi bien que les autres.

Practique.

Ie le feray volontiers : Mais auant que parler des fontaines de mon inuention, ie suis d’auis de te faire petit vn discours de la cause des bonnes ou mauuaises eaux, et de l’imprudence d’aucuns fontainiers modernes : Aussi des naissances des sources naturelles. Et pour cest effect il faut regarder à l’invention moderne, pour connoistre son vtilité et longue duree. Plusieurs desdits modernes, n’ayants nul moyen de trouuer sources ne fontaines viues, ont creusé les terres pour faire des puits, et pour obuier au grand labeur de tirer l’eau ils ont contemplé les pompes des nauires, et combien qu’elles soyent inuentees par nos antiques, aucuns artisans (desirans de gaigner, et se mettre en credit, aussi pour croistre leurs