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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/43

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XXXV

se dit étranger aux lettres, et ses écrits sont étonnants de profondeur, brillants d’imagination, d’esprit et de génie. Sa modestie n’en fut pas moins prise au mot ; et cependant, quand on considère cette intelligence supérieure qui s’applique à tous les sujets, qui saisit partout le point de vue le plus droit et le plus fécond, on se demande ce qu’est la science de tant d’hommes qui passent pour des savants !

Soit que les malheurs de l’époque eussent attristé son âme, soit par l’effet de son austérité naturelle, Palissy était porté à la mélancolie ; il aimait la retraite et la solitude, aussi son nom ne se trouve-t-il mêlé à aucun incident historique de son temps. Lorsqu’on s’est bien pénétré de la nature de son caractère, on se le représente, non comme un de ces artistes fougueux de la renaissance, dévorés d’orgueil et d’envie, pour lesquels la poursuite de leur art ne fut qu’un long combat, tout rempli de passions violentes et haineuses ; mais comme un penseur grave, sévère, religieux, toujours appliqué à la méditation, se promenant le front baissé pour interroger la nature, et ne relevant la tête que pour admirer ou bénir la Providence. C’est une de ces imposantes figures qui répandent sur leur époque un caractère austère et solennel, un des membres de cette illustre phalange qui sépara le moyen âge des temps modernes ; phares de l’intelligence, élevés au milieu d’un siècle de ténèbres, comme pour rappeler l’esprit humain à ses nobles destinées, et le guider désormais dans la carrière du perfectionnement.

P.-A. Cap.
Décembre 1843.