Page:Panet - Journal du siège de Québec en 1759, E. Sénécal Imprimeur-Éditeur, 1866.djvu/11

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
7

l’Europe et une armée nombreuse les presse du côté du Continent. Le parti qu’ils ont à prendre ne paraît pas douteux ; que peuvent-ils attendre d’une vaine et aveugle opposition ? Qu’ils en soient eux-mêmes les juges. Les cruautés inouïes que les Français ont exercées contre les sujets de la Grande-Bretagne établis dans l’Amérique, pourraient servir d’excuses aux représailles les plus sévères ; mais l’Anglais réprouve une barbare méthode. Leur religion ne prêche que l’humanité, et son cœur en suit avec plaisir le précepte.

« Si la folle espérance de nous repousser avec succès porte les Canadiens à refuser la neutralité que je leur propose et leur donne la présomption de paraître les armes à la main, ils n’auront sujet de s’en prendre qu’à eux-mêmes lorsqu’ils gémiront sous le poids de la misère à laquelle ils se seront exposés par leur propre choix. Il sera trop tard de regretter les efforts inutiles de leur valeur martiale lorsque pendant l’hiver ils verront périr de famine, etc., tout ce qu’ils ont de plus cher. Quant à moi, je n’aurai rien à me reprocher. Les droits de la guerre sont connus, et l’entêtement d’un ennemi fournit les moyens dont on se sert pour le mettre à la raison.

« Il est permis aux habitants du Canada de choisir ; ils voient d’un côté l’Angleterre qui leur tend une main puissante et secourable, son exactitude à remplir ses engagements, et comme elle s’offre à maintenir les habitants dans leurs droits et leurs possessions. De l’autre côté, la France, incapable de supporter ce peuple, abandonner leur cause dans le moment le plus critique, et si pendant la guerre elle leur a envoyé des troupes, à quoi leur ont-elles servi ? À leur faire sentir avec plus d’amertume le poids d’une main qui les opprime au lieu de les secourir. Que les Canadiens consultent leur prudence ; leur sort dépend de leur choix.

« Donné à notre Quartier Général, à la Paroisse St. Laurent, Isle d’Orléans, le 27e juin 1759.

« Depuis le 27 jusqu’au 29, il se fit différents préparatifs pour envoyer sept brûlots, dont trois gros vaisseaux marchands, et les autres goëlettes et bateaux. Le commandant des brûlots, le sieur Oclouches, commandait le navire marchand l’Américain. Le même jour, il fut décidé par un Conseil que le sieur Oclouches irait brûler ou faire chasser les trois frégates qui étaient d’avant garde, et que les autres, après qu’elles auraient levé l’ancre, iraient mettre le feu à la flotte de soixante voiles qui était mouillée sur trois lignes au dessus du Trou.

« Le projet était beau, mais bien mal exécuté. Le sieur Oclouches mit le feu après avoir dépassé la Pointe Levy, au sud d’icelle, et les