Page:Paquin - Le paria, 1933.djvu/24

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— Tiens, bonjour Mame Jodoin, salua le marchand, le père Savard, que les colons dénommaient entre eux : « le vieux Torvisse ». Qu’est-ce qu’y a de neuf à Morréal ?

— Pas grand chose, m’sieu Savard, mais ça profite, c’t’effrayant.

Elle était contente d’être interpellée devant tout le monde et de montrer qu’elle arrivait de loin, de la grande ville mystérieuse que plusieurs n’avaient jamais vue et dont le nom seul évoquait toute une féerie.

— C’est votre neveu que vous avez ramené ? s’enquit un colon, et s’adressant à l’enfant :

— Comment-ce tu t’appelles, toé, mon bonhomme ?

Jacques regarda autour de lui, décontenancé. Tout ce monde l’intimidait. Il se sentait petit, et dans sa bouche qui devenait sèche, sa langue, inerte, lui semblait paralysée.

— Dis à monsieur comment-ce tu t’appelles.

Alors, faisant un effort, il balbutia :

— Jacques Bernier.