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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

fique la magnanimité d’un parfait honnête homme fait échec. L’anatomiste, ambitieux et avide, traite la vie d’autrui comme une affaire, la surveille comme une expérience et fond la passion au creuset de la chimie, dans un épilogue « philosophico-toxicologique ». « Fritz est une de ces exceptions monstrueuses comme en produit parfois la nature. La société dans laquelle Dieu ne leur a pas fait de place, les détruit presque toujours, et quand la société ne les détruit pas, elles se détruisent elles-mêmes, comme ces scorpions…. » Aujourd’hui scorpion, vibrion demain. De son côté, Hermann personnifie une de ces abstractions chères à Corneille, quelque chose comme l’âme chevaleresque ; dès que Fritz la rendu à la vie, l’amour fait rage en cet homme admirable, mais esclave de ses muscles et de ses nerfs, comme il sied à un héros de drame. Positivisme et sensibilité, individualisme et souffrance, matérialisme et sacrifice, ironie et grandeur d’âme, symboles et violents transports de cœurs meurtris, qu’est cela, je vous prie, sinon le drame de la seconde moitié du xixe siècle ? Aujourd’hui le Comte Hermann, demain la Visite de noces ou la Femme de Claude.

En 1854, séduit par une trilogie d’Iffland, Crime par ambition, Dumas l’adapte à la scène française et aux idées contemporaines. Il essaye de faire vivre sur le théâtre une notion générale, sinon la conscience — car Edouard Ruhberg, son crime avoué, ne relève plus d’elle seule, — au moins l’expiation. En six actes, trois dans le monde bourgeois, trois dans la société aristocratique, il dresse cette entité à l’encontre du cynisme envahissant. Nous ne tarde-