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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/161

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LE CONTEUR.

La somme, sinon l’abrégé, de ces avatars imaginatifs est le Comte de Monte-Cristo. Quérard prétend que la première partie fut écrite par Fiorentino et la seconde par Auguste Maquet. « Il était si simple de croire que c’était moi, répond Dumas en exposant au public les sources de l’ouvrage et les pièces du différend (Causeries, I), que l’on n’en a pas eu l’idée. » Il en est de Monte-Cristo comme de la Tour de Nesle. En dépit de Quérard, et nonobstant Gaillardet, Dumas fecit. Cela est le superlatif de tous les superlatifs : donc cela est signé. Il s’est mis là dedans tout entier et en posture admirable. Ce conte est sa vie idéale. N’eût-il pas élevé sur la colline de Saint-Germain le château de Monte-Cristo, il suffit du roman pour nous assurer dans cette opinion. On y voit à même tous les mouvements soudains de sa nature tropicale ; on y voit tout au travers tous les transports de son âme ardente et vaniteuse. Un homme très amoureux, qui voulez-vous que ce soit ? — devient un seigneur très riche, — quand donc ceci pourra-t-il advenir ? — se substitue à la main de Dieu et s’établit sur terre au lieu et place de la Providence, — qui pensez-vous que ce puisse être ? À vrai dire, cet homme extraordinaire a la faiblesse de payer ses dettes et même celles d’autrui : ceci nous éloigne de Dumas, je le veux bien. Mais à la fin, la Providence s’esquive en compagnie d’une jeune grecque : oh ! que cette ultime prouesse nous en rapproche ! Eugène Sue triomphe avec ses antithèses sociales et le contraste amphigourique du cynisme et de l’humanitarisme ? En fait de contrastes, de conflits et de paroxysmes, on ne prend point Dumas sans vert.