de certains esprits. Ils ont trop de respect de la vérité pour se plaire à ces tours de passe-passe. Nous ne sommes plus au temps où l’on croyait à l’anneau de Gygès. L’imagination qui s’amuse à ces combinaisons n’est qu’enfantillage. — Que dire de celle du Maison-Rouge vrai ? Car il a existé, conspiré, écrit ses conspirations. M. G. Lenôtre vient de fouiller les bibliothèques et de remuer les papiers authentiques[1]. Il s’est plongé avec ivresse dans les documents inédits. Il s’en est retiré avec surprise, et se demandant où l’auteur du Chevalier de Maison-Rouge avait « puisé ces renseignements[2] ». Dans les mêmes documents ou à peu près. Car il oublie Maquet, érudit, fureteur et traqueur de sujets. Maquet avait eu sous les yeux la Pétition aux Cinq-Cents, le Procès des Bourbons publié à Hambourg, et sans doute quelques autres choses compulsées aux archives. Le livre de M. Lenôtre est intéressant et scrupuleux. Mais ce qu’il a révélé de plus curieux, c’est encore l’impuissance du romancier et, à plus forte raison, du dramaturge à rivaliser de fantaisie avec les aventures merveilleuses de l’histoire.
Cet aventurier se faisait passer pour marquis de Rougeville, chevalier de l’ordre de Saint-Louis. Il ne s’appelait pas Rougeville ; il n’était ni chevalier ni marquis. Il avait nom Gonsse, Gonzze ou Gousse, fils d’un paysan enrichi dans la ferme des eaux-de-vie d’Arras. Il fut élevé en grand seigneur, dans le château paternel ; mais, dès l’adolescence, les Tuileries l’attirent. Ici commence la vie incroyable, singulière, extravagante de ce louche héros, hâbleur de génie. Il a consigné dans ses écrits comment il conquit grades et