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DUMAS PÈRE ET DUMAS FILS.

romantique apologie de l’amour dans une œuvre toute chrétienne. À partir des Idées de Madame Aubray, Dumas fils rejoint son père et le dépasse.

La Femme de Claude est un drame symbolique. Malgré tout, il me plairait qu’il le fût moins. Mais il l’est. De cette conception dramatique on sait les origines. Tout le théâtre de 1830 en fut entiché ou du moins en afficha la prétention. À proportion que les symboles étaient plus ambitieux, le drame, ou même le mélodrame était plus violent. Il paraît que Charles VII en est tout rempli ; Yaqoub incarne l’Orient ; Bérengère l’Occident : on se souvient du reste[1]. Le reste, ce sont les passions rugissantes. Le Comte Hermann aussi est une œuvre symbolique ; et nous avons vu que, si les personnages y sont plus chastes, leurs sentiments n’en sont pas moins exaspérées. La Femme de Claude se rapproche singulièrement du Comte Hermann, sans dédaigner la poétique d’Antony, d’Angèle ou de Catherine Howard. Comme dans le Comte Hermann, le symbolisme se réduit à l’opposition des deux principes du bien et du mal. Et elle se marque énergiquement par les moyens ordinaires du Dumas de 1830. L’homme de bien, le sauveur, le patriote, le savant, c’est Claude, substitut de Dieu sur la terre[2]. À inventer canons et fusils, il a tué en lui l’amour qu’il ressentait pour une femme indigne. Il est grand, il est juste, il est bon, il est supérieur, il sera un jour le premier de son pays. Thane de Glamis, tu seras roi[3]. Fiesque, tu seras doge et libérateur par le fusil et le canon. On le lui dit : il le croit[4].

  1. Voir Préface de Charles VII chez ses grands vassaux, p. 229.
  2. La Femme de Claude (Th., V), III, sc. i, p. 202.
  3. Macbeth, I, sc. iii, p. 408.
  4. La Femme de Claude, II, sc. i, p. 277 : « Je vous aime, parce que vous êtes juste… Et vous serez un jour le premier de votre pays. »